Dans l’article Un réseau d’entreprises saisonnières pour stabiliser les emplois: l’expérience du Mont Sutton, on dévoile les efforts de la responsable des ressources humaines du Mont Sutton pour conquérir la main-d’œuvre nécessaire pour les opérations hivernales de la station de ski, malgré un bassin de recrutement limité. Une des solutions mises en place consiste à favoriser le partage de ressources humaines avec d’autres entreprises à proximité selon les saisons et les besoins.
Cette pratique va au-delà du premier niveau perçu d’offrir une certaine stabilité d’emploi aux employés saisonniers. Sur le fond, on doit comprendre que les compétences acquises en matière de service à la clientèle dans une entreprise, peu importe le secteur d’activité, sont transférables dans d’autres contextes d’emplois. Et vice versa.
Des attentes plus élevées envers les services touristiques
Ceci dit, les employés de première ligne doivent toutefois apprendre à faire une importante distinction dépendamment du secteur d’activité dans lequel ils travaillent. Les services touristiques se distinguent de l’expérience dans un commerce de détail traditionnel ou des services d’autres secteurs d’activités, entre autres, par le niveau d’attente des clients.
Des chercheurs ont étudié en profondeur le concept d’expérience et considèrent qu’il en existe deux types : les expériences ordinaires, celles émanant de la vie au quotidien nécessitant peu ou pas de préparation et les expériences extraordinaires, celles que nous anticipons et pour lesquelles nous effectuons une planification (Abraham 1986). Par exemple, nos attentes quant à la qualité de l’expérience sont habituellement peu élevées lorsque vient le temps d’effectuer une visite chez le dentiste ou de passer au garage pour faire réparer sa voiture. C’est tout le contraire lorsque nous voyageons ou sommes en période de loisirs. De par la nature même des loisirs et du tourisme, le précieux temps que nous y consacrons et le budget investit, nous nous attendons à vivre du bonheur, des frissons, de l’émerveillement, des moments d’enchantement, du « wow » !
Quatre dimensions importantes dans la qualité de l’expérience touristique
Les résultats d’une recherche effectuée par Otto et Ritchie (1996) suggèrent quatre dimensions importantes pour les clients dans la qualité de l’expérience touristique :
- Dimension hédonique : Est-ce que j’effectue une activité que j’aime, que je pourrai partager avec d’autres, ai-je l’impression d’échapper au quotidien, ai-je l’impression que je vis une aventure?
- Dimension sécurité: Est-ce que j’ai l’esprit tranquille, suis-je relaxe, suis-je en sécurité?
- Dimension implication : Suis-je impliqué dans le processus, ai-je un certain contrôle sur la finalité, suis-je éduqué et informé durant l’expérience?
- Dimension reconnaissance: Suis-je pris au sérieux? Est-ce qu’on me considère comme important?
Au-delà de la gestion des lignes d’attente
John Crompton, spécialiste de la gestion de la qualité souligne que le réel défi pour l’industrie touristique est « de créer le bon environnement psychologique chez le client et non pas uniquement s’affairer aux choses techniques ». Ainsi, en tant que gestionnaire en tourisme, il faut aller au-delà des éléments plus techniques et facilement contrôlables tels que le temps d’attente et le style de l’uniforme et miser davantage à apprendre à mieux connaitre sa clientèle, ses attentes, ses sentiments, ses impressions et ses émotions. Un défi de taille certes, mais de plus en plus accessible grâce, entre autres, à la formation des employés de première ligne, des superviseurs et des gestionnaires. Les entreprises sérieuses souhaitant miser sur l’expérience client doivent aussi prévoir une stratégie intégrant de la recherche afin de mieux connaître leurs clients: études de profil de la clientèle, segmentation de la clientèle, études de satisfaction, etc.
L’industrie touristique se démarque des autres secteurs en proposant des emplois riches en matière de développement de compétences, d’expériences de service à la clientèle et des emplois divertissants et parfois hors du commun dans le domaine de la création d’expériences extraordinaires. C’est d’ailleurs fréquemment cette promesse qui attire des employés dans notre passionnant domaine!
Références:
Abrahams, R.D. (1986), Ordinary and Extraordinary Experience, in V.W. Turner and E.M. Bruner (eds) The Anthropology of Experience, pp 45-73. Urbana, IL: University of Illinois Press.
Otto et Ritchie (1996), The service experience in tourism, Tourism Management, Vol. 17, no. 3, pp.165-174.
Richie et Hudson (2009), Understanding and meeting the Challenges of Consumer / Tourist Experience Research, International Journal of Tourism Research, pp. 111-126.
Pine and Gilmore (1999), The Experience Economy, Work is Theatre and Every Business is a Stage, Harvard Business Press, 254 pages.